Procédures collectives et spécificité de l’instance prud’homale en cours : faute pour le mandataire judiciaire de se manifester auprès de la juridiction, la décision rendue lui est opposable

Publié le : 28/05/2018 28 mai mai 05 2018

Le droit des procédures collectives prévoit que les instances en cours à la date du jugement d'ouverture sont interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance au passif de son débiteur.   Une fois cette déclaration établie, les instances sont reprises de plein droit, les organes de la procédure dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant. Pour les instances prud’homales, le Code de Commerce prévoit un mécanisme différent car en effet, les salariés sont dispensés de déclarer leurs créances au passif du débiteur.   Mais dans tous les cas, l’article L. 625-3 du Code de commerce indique que l’instance prud'homale en cours suppose la mise en cause du mandataire judiciaire.   L’article précise en effet que « Les instances en cours devant la juridiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture sont poursuivies en présence du mandataire judiciaire et de l'administrateur lorsqu'il a une mission d'assistance ou ceux-ci dûment appelés.  Le mandataire judiciaire informe dans les dix jours la juridiction saisie et les salariés parties à l'instance de l'ouverture de la procédure. »   Dans une affaire, un débat de procédure s’est installé dès lors que le mandataire judiciaire n’avait pas procédé à l’information qui doit être faite à la juridiction.    Un salarié avait été licencié pour faute grave, et devant le Conseil de Prud’hommes, il est débouté de ses demandes d’indemnité et de licenciement.   Il interjette appel de la décision.   Mais pendant l’instance d’appel, l’employeur est placé sous le régime de la liquidation judiciaire.   Le liquidateur judiciaire omet de signaler à la Cour d'Appel l’ouverture de la procédure collective de l’employeur.   Le problème (pour l’employeur et le liquidateur) est que la Cour va totalement infirmer la décision du Conseil de Prud’hommes, et condamner l’employeur défaillant à payer diverses sommes à son ancien salarié.   Le liquidateur se pourvoit en cassation en exposant que la liquidation judiciaire du débiteur emporte son dessaisissement, et l’absence de convocation du liquidateur es qualités conduit le débiteur à être jugé sans avoir été entendu et/ou appelé.    Il indiquait également à l’appui de son pourvoi, outre la violation des dispositions du Code de Commerce, du Code du travail et du Code de procédure civile, que dès lors que le débiteur se voyait placé sous le régime de la liquidation judiciaire, les demandes du salarié ne pouvaient tendre qu’à la fixation des sommes au passif de la société et non à sa condamnation.   La Cour de Cassation le déboute sèchement et rejette son pourvoi, dans une motivation au terme de laquelle la Cour d'Appel n’ayant pas été avertie par le mandataire judiciaire de l’ouverture d’une procédure collective, il ne peut lui être fait aucun reproche et sa décision échappe aux critiques du moyen.   La solution n’est pas nouvelle, la Cour de Cassation ayant déjà jugé que le défaut d'information de la juridiction prud'homale et du salarié, de la part du mandataire judiciaire ou du liquidateur, conduit l’instance à se poursuivre valablement, et la décision rendue est opposable au mandataire judiciaire ou au liquidateur ainsi qu’à l'AGS (Cass. soc., 17 sept. 2003, n° 01-41.255 : JurisData n° 2003-020199 ; D. 2003, p. 2376 ; JCP E 2004, 473, p. 517, n° 6, obs. P. Morvan).   La Cour de Cassation rappelle donc la spécificité des instances prud’homales au terme de cet arrêt du 28 février 2018 : le mandataire judiciaire qui omet de signaler à la juridiction saisie l’existence de la procédure collective du débiteur ne peut s’en prendre qu’à lui-même.   Cour de Cassation ch. Soc, 28 février 2018 n°15-24857   

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