Sur la possibilité pour l'assureur d'insérer une clause permettant de refuser toute indemnité en cas de non déclaration du chantier (2)

Publié le : 30/06/2020 30 juin juin 06 2020

  Par un arrêt en date du 5 mars 2020, la 3e chambre civile de la Cour de Cassation a maintenu une jurisprudence classique, mais néanmoins particulièrement dérangeante, selon laquelle est valable la clause de la police d'assurance qui stipule que la non déclaration d'une mission, c'est-à-dire d'un chantier, constatée après sinistre, donne droit à l'assureur de refuser toute indemnité. Cette solution, particulièrement dangereuse pour le maître de l'ouvrage, a ainsi été très largement critiquée, notamment parce qu'elle revient à détourner la Loi Spinetta du 4 janvier 1978, imposant au constructeur d'être assuré concernant la garantie décennale. En effet, si le constructeur omet de déclarer son chantier, ceci avant que le sinistre ne se produise, il risque alors de se voir opposer, de la part de l'assureur, un refus de garantie. Cela est contraire à la volonté du législateur, qui consiste à faire en sorte que chaque dommage de nature décennale trouve un assureur pour garantir le sinistre. En l'espèce, des maîtres d'ouvrage, particuliers, ont fait construire une maison d'habitation dont ils ont confié la maîtrise d'œuvre à un architecte, assuré en responsabilité civile décennale. La société qui devait réaliser les travaux les abandonne en cours de chantier, puis est placée en liquidation judiciaire, tout comme le maître d'œuvre. Se plaignant de désordres, les maîtres d'ouvrage assignent, après expertise judiciaire, l'assureur de responsabilité civile décennale du maître d'œuvre. Celui-ci oppose alors une clause selon laquelle la non déclaration d'une mission constatée après un sinistre ouvre droit à l'assureur de refuser toute indemnité. Or, en l'espèce, le chantier ne lui avait pas été déclaré par le maître d'œuvre. Par arrêt en date du 27 septembre 2018, la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE a condamné l'assureur du maître d'œuvre au motif que cette clause, découlant de l'article L.113-9 du Code des assurances, constitue en réalité une condition de garantie, non identifiable comme tel par les tiers et qu'ainsi l'assureur avait contrevenu aux clauses type. L'article L.113-9 du Code des assurances dispose en effet que: "L'omission ou la déclaration inexacte de la part de l'assuré, dont la mauvaise foi n'est pas établie, n'entraine pas la nullité de l'assurance. (…). Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés." Or, la Cour de Cassation, au sein de son arrêt en date du 5 mars 2020, a censuré la décision de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en considérant que la non-déclaration d'une mission constatée donne droit à l'assureur de refuser sa garantie. Ainsi, le maître de l'ouvrage, afin de préserver ses intérêts, ne doit pas se contenter de solliciter de la part du constructeur l'attestation de l'assurance qu'il a souscrite, mais doit par ailleurs solliciter copie du courrier recommandé avec avis de réception envoyé par le constructeur à son assureur, afin de déclarer le chantier. *   *   * Lien : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000041745249&fastReqId=1152218204&fastPos=1 Source: Civile 3e, 5 mars 2020, n° 18-26.801  

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