Sur le délai d’indemnisation dont dispose l’assureur dommage-ouvrage

Publié le : 09/03/2022 09 mars mars 03 2022

Au sein d’un arrêt rendu par la 3ème Chambre de la Cour de Cassation, en date du 16 février 2022, la Haute Juridiction a énoncé que l’assureur dommage-ouvrage ne peut plus contester, après l’expiration du délai de 90 jours, la définition des travaux propres à remédier aux dommages déclarés et dont il a offert l’indemnisation. Ainsi, il ne peut plus réclamer la restitution des indemnités affectées par l’assuré à l’exécution des travaux que ces indemnités étaient destinées à assurer. L’article L 242-1 du Code des Assurances énonce notamment que : « Lorsqu'il accepte la mise en jeu des garanties prévues au contrat, l'assureur présente, dans un délai maximal de quatre-vingt-dix jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, une offre d'indemnité, revêtant le cas échéant un caractère provisionnel et destinée au paiement des travaux de réparation des dommages. (…) » En l’espèce, la Société RD a fait construire des bâtiments à usage de bureaux. Elle a souscrit deux polices d’assurance de dommages-ouvrages auprès de la Société A. La réception est intervenue le 1er août 2013, avec des réserves concernant notamment l’état des cassettes de bardage recouvrant les façades. Après réception, la Société RD a déclaré un sinistre à la Société A, concernant la chute de cassettes de bardage. Au vue du rapport de l’expert qu’elle avait désigné, la Société A a proposé une indemnité à l’assuré, qui l’a acceptée. La Société RD a alors fait procéder aux travaux de réparation. Considérant que l’indemnité versée incluait indûment la réparation de dommages non déclarés et réservés à la réception, la Société A a réclamé à l’assuré, en vain, le remboursement d’une partie de la somme versée à titre d’indemnité, puis l’a assigné en paiement. Par arrêt en date du 10 septembre 2020, rendu par la Cour d'appel de CAEN, la Société RD a été condamnée à payer une certaine somme à la Société A. La Société RD s’est donc pourvue en cassation. Par arrêt rendu par la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation, en date du 16 février 2022, il a été énoncé que : « Pour condamner l’assuré à restituer à l’assureur une partie des indemnités convenues entre les parties, l’arrêt retient qu’il ne résulte pas des écritures de la Société ALLIANZ qu’elle entend revenir sur la reconnaissance du caractère généralisé du désordre, ni sur la mobilisation de sa garantie, mais sur la nature des éléments devant donner lieu à indemnisation, et que l’indemnité due par l’assureur de dommages-ouvrage ne concerne que le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs sur le fondement de l’article 1792 du Code Civil, l’indemnité versée ne pouvant excéder le paiement des travaux ainsi définis, le surplus relevant d’un paiement indu.  En se déterminant ici, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le délai de 90 jours pour formuler une offre d’indemnisation n’était pas expiré ou sans constater que l’assuré n’avait pas employé l’indemnité versée à la réparation des désordres, la Cour d'appel n’a pas donné de base légale à sa décision. » Ainsi, l’arrêt de la Cour d'appel de CAEN, en date du 10 septembre 2020, est cassé par la Haute Juridiction. L’assureur dommages-ouvrage doit donc proposer une indemnité dans le délai de 90 jours suivant la déclaration de sinistre, ce qui suppose que la nature des travaux de reprise soit connue dans ce même délai. En l’espèce, l’assureur aurait dû se rendre compte, dans le délai, que les travaux réparatoires couvraient des désordres non garantis par la police, par exemple pour avoir été apparents à la réception. Cette solution est conforme à l’esprit de l’assurance dommages-ouvrage, qui a pour objet l’indemnisation rapide du maître de l’ouvrage, afin que celui-ci puisse exécuter les travaux dans les meilleurs délais. Néanmoins, une interrogation demeure quant à la sanction puisque l’indemnité, versée au-delà du délai, est majorée de plein droit d’un intérêt égal au double du taux de l’intérêt légal. L’assureur peut donc avoir intérêt à indemniser le maître de l’ouvrage après l’expiration du délai, afin de s’assurer de ne pas indemniser des travaux qui ne relèvent pas de sa garantie. *   *   * Source : Civil 3 16/02/2022 n° 20-22.618 Lien : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000045197130?init=true&page=1&query=20-22618&searchField=ALL&tab_selection=all

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